Avant de se lancer dans la manipulation proprement dite, il est nécessaire de se poser diverses questions :
- De quelles informations disposent-on sur la nature du mélange à analyser (nature, mode de préparation…)
- Quelles sont les propriétés physiques et chimiques des composés à séparer (polarité, solubilité, propriétés spectrales…)
Après avoir résolu les problèmes de préparation de l’échantillon et choisit le type de chromatographie (partage, phase réverse, exclusion-diffusion…), la mise au point se fait en 3 étapes :
- Obtenir un début de séparation dans un délai acceptable
- Ajuster la sélectivité en agissant sur la phase mobile
- Optimiser la méthode en influant sur le débit, la taille des particules, la longueur de la colonne, la température…
De manière idéale, les k’ doivent être d’environ 2 à 10, mais en pratique ils donnent de bonnes séparations en étant compris entre 1 et 20.
La méthode analytique finale sera telle que tous les pics intéressants seront résolus. C’est à dire que le couple limitant le plus la séparation doit avoir une résolution R de 1,5 ou plus.
Dans la pratique la résolution doit être comprise entre 1,5 et 2. Si la résolution est supérieure à 1,6, le temps d’analyse augmente inutilement. Mais si l’on veut effectuer un grand nombre d’analyses sans avoir de problèmes dus à l’évolution inévitable de la colonne, il vaut mieux voir large sur la valeur minimale de résolution, quitte à perdre un peu de temps dans les premiers chromatogrammes d’une série d’injections.
1. Obtenir un début de séparation
En théorie
En HPLC de phase inverse (réverse) un des éluants est l’eau qui n’interagit pas avec la phase stationnaire (très hydrophobe) et donc ne rentre pas en compétition avec les solutés à séparer pour la fixation sur cette phase mobile.
En phase normale l’eau est le plus couramment remplacé par l’hexane.
Le second éluant d’un mélange binaire est lui appelé « modificateur » et interagit avec la phase stationnaire entrant ainsi en compétition avec les solutés à séparer. Ainsi si la concentration du « modificateur » diminue, les temps de rétention des solutés augmentent et vice versa.
En HPLC de phase inverse, le facteur de capacité est relié à la teneur en solvant organique par une relation de forme :
avec Xs fraction volumique du solvant organique
Remarques :
Ce type d’influence de la phase mobile n’est valable si n’interviennent que des interactions de type hydrophobes. Si d’autres interactions sont en jeu (ioniques, affinités…) cette analyse est très différente.
Il existe aussi des interactions entre solutés à séparer et molécules éluantes qui interviennent sur la qualité de la séparation.
En pratique
Avec des composés inconnus, il est conseillé de travailler en polarité de phase inversée : la phase stationnaire de colonne est généralement une silice greffée C18. La colonne classique a 15cm de longueur, 4,6mm de diamètre interne, le diamètre des particules est de 5 ou 10mm. Un mélange de méthanol et d’eau est facile à utiliser, transparent aux U.V. et permet d’avoir des résultats satisfaisants. Au départ on travaille à température ambiante avec un débit de 1 à 2 ml/min, compatible avec la pression en tête de colonne.
Une large plage de composition de phase mobile (à base « méthanol - eau ») peut convenir. Mais pour atteindre une séparation convenable le plus vite possible, il vaut mieux débuter avec une force éluante importante et au besoin la diminuer. 100% de méthanol élue les composés très rapidement, mais peut être trop. 90% est un bon compromis de départ.
Avec 90% de méthanol, la force éluante est souvent encore trop importante ; tous les composés sortent proche du front de solvant (temps mort) et tous ne sont pas séparés.
Une bonne méthode consiste à diminuer la teneur en solvant organique (dans notre cas le méthanol) par pas de 10 ou 20% (90% 70% 50%...) et au besoin remonter par pas plus faibles de 5 ou 10% (55% ou 60% par exemple). De cette façon, on balaye rapidement la plage de force éluante de la phase mobile. La plupart du temps en 3 ou 4 injections un début de séparation apparaît.
2. Ajuster la sélectivité
Le solvant organique de la phase mobile
Les solvants organiques les plus usités sont l’acétonitrile, le méthanol et le tétrahydrofuranne (THF). Le THF est le moins utilisé car il a tendance à former des peroxydes explosifs quand il n’est pas stabilisé et est plus difficile à dégazer. Le mélange « méthanol - eau » mal dégazé a fortement tendance à former des bulles dans les têtes de pompe (à mélange basse pression) qui entraînent des fluctuations de débit, surtout en gradient de concentration. L’acétonitrile est cher.
Pour jouer sur la sélectivité, on remplace le méthanol par l’acétonitrile ou le THF. Le principe de l’optimisation avec les autres solvants est le même que dans le méthanol (70% 50% 30%... et au besoin remonter à 35% ou 40%).
En examinant plus précisément les chromatogrammes, on constate souvent que les 2 pics limitant la résolution ne sont pas toujours les mêmes lorsque l’on change la composition de la phase mobile. Il faut se souvenir tout de même qu’en chromatographie en général comme en HPLC, les pics ne sautent pas d’un bout à l’autre du chromatogramme, mais suivent une évolution régulière si l’on change la composition de la phase mobile.
En moyenne, la sélectivité avec l’acétonitrile est légèrement meilleure qu’avec le méthanol, mais chacun a ses habitudes de mise au point. L’acétonitrile utilisé en HPLC transparent aux U.V. de longueurs d’ondes courtes est plus cher que le méthanol. Dans la mesure du possible il vaut mieux financièrement utiliser le méthanol, surtout dans la phase de mise au point de l’analyse. Lors de l’optimisation l’expérience montre que l’on a souvent intérêt à utiliser l’acétonitrile.
Mélanges ternaires
A ce stade, il est parfois possible ou incontournable d’utiliser un mélange ternaire, mais la mise au point est plus complexe.
Par exemple si les résultats tout juste satisfaisants ont été obtenus en isocratique, avec 35% de CH3 CN (65% d’eau), ou avec 55% de CH3 OH (45% d’eau), il est possible qu’en faisant un mélange « 50/50 » des mélanges précédents, on obtienne une bonne séparation.
Pour cela, on peut réaliser un mélange ternaire de composition suivante :
- 17,5% de CH3 CN
- 27,5% de CH3 OH
- et 55% d’eau
Le temps d’analyse devrait être la moyenne des 2 temps obtenus dans chacune des conditions isolées. De toute façon, un mélange binaire est plus simple à mettre en oeuvre qu’un mélange ternaire. En chromatographie aussi, le mieux étant l’ennemi du bien, si la séparation dans un mélange binaire est acceptable, il vaut mieux l’utiliser.
Gradient d’élution
Certains proposent des procédures de mise au point de méthodes qui préconisent d’utiliser un gradient de concentration pour balayer en une injection la plage de force éluante possible d’obtenir avec une phase mobile (par ex. de type « méthanol - eau »).
Dans ce cas, la force éluante est faible au début de chromatogramme, puis elle augmente progressivement . En polarité de phase inversée, la phase mobile contient peu de méthanol au moment de l’injection ; puis progressivement sa teneur augmente.
Suivant l’allure du chromatogramme obtenu, la pente du gradient peut être augmentée ou diminuée pour que le chromatogramme final présente tous les solutés bien séparés. Il est possible de modifier le profil du gradient à volonté suivant l’appareillage utilisé, d’y ajouter des paliers durant lesquels la composition de la phase mobile reste constante quelques instants.
3. Optimisation finale
Pour améliorer la séparation, il est possible de jouer sur différents paramètres comme la taille des particules de remplissage de la colonne. En diminuant leur diamètre ou en utilisant des particules plus régulières, on augmente généralement l’efficacité de la colonne.
L’optimisation consiste à trouver des conditions opératoires pour lesquelles la séparation
sera satisfaisante pour un temps d’analyse court :
- Pour cela, la phase mobile doit avoir une force éluante importante (contenir beaucoup de méthanol) tout en gardant une sélectivité correcte.
- La colonne doit être la plus courte possible. Le débit doit être important. Il est limité par la perte de charge provenant principalement de la colonne. Plus le diamètre des particules est faible, meilleure est l’efficacité mais plus importante est la pression.
- La température a aussi son rôle, en particulier sur la finesse des pics et dans une moindre mesure sur le temps d’analyse. Le plus important est que, en maintenant la température, on s’assure de la répétabilité des chromatogrammes car on limite les variations locales de température dues aux frictions de la phase mobile sur la phase stationnaire.